Place aux femmes dans la Classique

Voici La Classique : une nouvelle sélection exclusivement féminine où chaque morceau résonne comme un chapitre d’histoire, une offrande musicale et une claque d’élégance. De l’intensité militante de Letta Mbulu à la grâce solaire de Bella Bellow, en passant par les vibrations rebelles de Tshala Muana et les appels viscéraux de Nahawa Doumbia, cette playlist tisse un fil invisible entre les terres, les luttes et les héritages. Ici, pas de compromis : chaque voix s’élève, belle et forte, pour dire, guérir, danser et transmettre. Parce que la mémoire des peuples passe aussi par les femmes qui la chantent.

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Letta Mbulu « Not Yet Uhuru », une voix pour un cri de liberté // Afrique du Sud

Sous les cuivres tendus et les harmonies soul, Letta Mbulu fait entendre bien plus qu’une chanson : « Not Yet Uhuru » est une déclaration d’espoir suspendue dans le tumulte de l’histoire sud-africaine. Dans ce morceau au groove profond et aux éclats de jazz cosmique, la voix de Mbulu s’élève comme un rayon de lumière sur les terres encore sombres de l’apartheid. Exilée aux États-Unis depuis les années 60, elle chante l’Afrique du Sud à distance, mais avec une intensité viscérale — chaque note est une prière, chaque refrain un rappel : la liberté n’est pas encore là (uhuru, en swahili), mais elle approche. Le morceau, produit avec la finesse et la puissance caractéristiques de la diaspora sud-africaine en lutte, fusionne l’âme militante de Miriam Makeba et la sophistication de Quincy Jones. C’est de la musique pour danser, oui, mais aussi pour se souvenir, rêver et résister. Letta Mbulu, par sa grâce, fait vibrer les frontières entre l’art, l’exil et l’émancipation.

Yvonne Maha « Wings of a Dove », lumineuse et adolescente // Nigeria

Sur un nuage de cuivres dorés et de percussions moirées, la voix d’Yvonne Maha glisse avec une douceur presque irréelle : « Wings of a Dove » est un chant d’espoir murmuré à l’oreille des cœurs brisés. Sorti au Nigeria au début des années 1980, ce slow soul mystique, emprunté au gospel anglo-saxon et réchauffé aux brises highlife, évoque ces ballades de fin de soirée où la douleur danse avec la tendresse. Yvonne Maha y chante l’élévation, la paix, et les promesses d’un ailleurs — celui qu’on atteint les yeux fermés, porté par les ailes d’une colombe. Derrière l’apparente simplicité du morceau, c’est toute la spiritualité postcoloniale d’un Nigeria tiraillé entre la modernité qui plane sur le continent, et son identité profonde. Une voix féminine rare, lumineuse, et adolescente qui rappelle que même dans l’ombre, il reste des chants pour s’envoler.

Tshala Muana « Ndeka Ya Samuel », un portrait flamboyant de la femme congolaise // RDC

Dans le tourbillon de la rumba congolaise, « Ndeka Ya Samuel » de Tshala Muana s’impose comme un hymne incandescent, où la reine de la Mutuashi déploie toute la puissance de sa voix et de son charisme. Sorti dans les années 90, ce titre est une déclaration d’amour et de fierté, portée par des guitares aiguisées et des percussions dansantes qui font vibrer les cœurs et les corps. Tshala, avec sa fougue légendaire, raconte ici l’histoire d’une femme libre, capable de défier les conventions tout en célébrant la vie et ses passions. Entre mélancolie et joie explosive, « Ndeka Ya Samuel » dresse un portrait flamboyant de la femme congolaise, fière, rebelle et lumineuse. Un classique intemporel qui continue de faire danser les générations, avec cette énergie brute et contagieuse propre à Tshala Muana.

Nahawa Doumbia « Sogodounou », le cri d’alarme du Wassoulou // Mali

Dans « Sogodounou », Nahawa Doumbia entonne bien plus qu’un chant : elle invoque la mémoire vive du Wassoulou, ce terroir du sud malien où les voix de femmes portent comme des tambours. Sur un balafon qui claque comme un orage sec et une kora qui serpente comme un fleuve ancien, sa voix s’élève, grave et brûlante, pour parler de dignité, d’injustice et de résilience. « Sogodounou » — littéralement “celui qui trahit sa propre terre” — sonne comme une mise en garde, un cri d’alarme face aux dérives d’un monde qui oublie ses racines. Nahawa, avec cette force tranquille qui la distingue depuis ses débuts dans les années 80, ne chante pas pour plaire, mais pour éveiller. Entre tradition mandingue et arrangements plus modernes, le morceau est un coup de poing doux, un appel à la loyauté, à l’ancrage, à ne pas vendre son âme aux vents passagers. Une chanson comme un talisman, à écouter le cœur ouvert et les pieds dans la poussière rouge du pays.

Bella Bellow « Denyigban », la douleur de l’exil et l’amour de la terre // Togo

Avec « Denyigban », Bella Bellow transforme la douleur de l’exil et l’amour de la terre en une berceuse universelle. Dans ce chef-d’œuvre sorti en 1970, la voix cristalline de la diva togolaise plane au-dessus d’un arrangement sobre mais d’une élégance infinie, entre folk acoustique, jazz discret et mélodies héritées des chants éwé. « Denyigban » — “la terre natale” — n’est pas un simple retour aux sources : c’est un chant sacré, une offrande portée par l’émotion brute, celle qui serre la gorge et ouvre le cœur. Bella y chante l’attachement au pays comme on récite une prière silencieuse, avec une gravité douce qui traverse les décennies. Dans chaque souffle, on entend le Togo, bien sûr, mais aussi tous les territoires intimes que l’on quitte un jour sans vraiment partir. Une chanson rare, bouleversante, qui rappelle pourquoi Bella Bellow reste une étoile filante dont la lumière ne cesse de briller.

Djolo – La Classique :

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