Découvert avec les séries Seeds de chez Jarring Effects, le beatmaker et producteur français Paul Boutique s’apprête à sortir son premier album chez Galant Records, un album érigé en forme de Supérette, et pour cause c’est là son nom. Alors, autant vous le dire, ici on aurait pu être tenté de vous faire monter la sauce autour de cette Supérette, en grossissant le trait, en vous promettant un hyper, un hard discount, un truc démesuré, avec des hectares de surface commerciale… mais la vérité c’est que le nom de Supérette colle bien au disque, on y déambule dans des rayons bien achalandés de beats hip-hop, de pulsations électroniques, de bass music bio en vrac, mais qui reste à taille humaine ! Oui avec cette Supérette de Paul Boutique on y rentre en disant bonjour au patron, on croise des magasiniers souriants, soucieux de bien nous renseigner, de nous indiquer la meilleure allée pour trouver Eesah Yasuke entrain de planquer son Cadavre Exquis sous un monticule de rondeurs basses, où sont ranger les meilleurs Vax1, et puis on aperçoit là-bas Double A, Lyah et Deux Lyricist entrain d’escalader des bars sur un capricieux escabeau qui balance d’un boom à un bap… Jusqu’à ce que vous vous retrouviez dans le rayon fruits et légumes, devant un étal de bananes importées de la Guadeloupe… et que de la gangue jaune des fruits oblongs vous sembliez entendre un sanglot rageur en sortir… celui de Olivya et son titre « Kriyé an moé ».
Car si Boutique ouvre ses portes officiellement le 2 mars prochain, il commence déjà à remplir notre panier avec un lourd premier extrait du disque, tant sur le fond que sur la forme, « Kriyé an moé », qui laisse une carte blanche créole et brumeuse à la chanteuse de Dowdelin, Olivya ! Sur ce nouveau titre la chanteuse se débat dans une instru sombre et pesante avec un chant qui tient autant du pleur que de du cri de colère, et de résistance. Celui d’une jeune artiste caribéenne qui voit comment son ile a été maltraitée, comment l’on tend à dissimuler les détails de cette histoire faite de rapports injustes entre colons et esclaves, entre métropole et insulaires, entre riches exploitants agricoles, riches patrons de bananeraie, et une population pauvre victimes des mauvaises conditions de travail, et d’un empoisonnement massif aux produits chimiques pesticides ; 9 Guadeloupéens sur 10 sont contaminés au chlordécone, insecticide toxique qui a été utilisé pendant plus de 20 ans dans les bananeraies de Guadeloupe, alors même que l’on en connaissait les dangers. Un premier aperçu fébrile et puissant de cette Supérette de Paul Boutique !
Paul Boutique ft. Olivya – « Kriyé an moé » :
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