Initiation mystique ou profane au bwiti avec Kadi Yombo de Papé Nziengui

On retrouve encore une fois le label Awesome Tapes From Africa aux manettes de ce disque, Kadi Yombo de Papé Nziengui, qui nous conduit aux confins de l’Afrique et du mystique, du profane et du temps ; eh oui il s’agit d’une réédition d’un disque paru initialement en 1989. Ce disque nous emmène au Gabon à la rencontre à la fois d’un artiste brillant et novateur, peut-être même révolutionnaire, et en même temps sur la trace des traditions du peuple Mitsongo et des rites d’initiation bwiti, l’iboga en moins heureusement… ou malheureusement !

Alors là, vous êtes surement en train de vous demander de quoi on vous parle ! On va planter un peu le contexte. Comme vous le savez, le Gabon, comme beaucoup de régions d’Afrique, est un territoire parcouru par le mystère et le mystique, et par des traditions qui savent garder leurs secrets. Et chez les mitsongo, peuple dont est originaire Papé Nziengui, il y a un rite initiatique, le bwiti, qui fait beaucoup parlé, les initiés quand ils consomment l’iboga une plante gorgée d’alcaloïdes hallucinatoires nécessaires à l’initiation, et les non-initiés qui aimerait savoir ce qu’est le bwiti… et il se trouve justement que Papé Nziengui, en tant qu’individu male mitsongo a été ini… ah non, justement il n’a pas été initié…

Et c’est là tout le sel de sa musique, musicien prodige, Papé Nziengui a très jeune été chargé du rôle de béti dans son village, c’est-à-dire de jouer de la harpe traditionnelle, le ngombi, au cours des rites et des cérémonies. Mais quittant prématurément le village pour migrer vers Libreville, la capitale, et même si une fois en ville il a fréquenté les bandjas, les temples bwitistes, il a très vite été happé par d’autres dieux plus profanes eux, ceux de la scène et de la musique populaire. Et c’est en dansant entre ces deux mondes ceux du sacré et du profane, du divertissement et de la religion, que Papé Nziengué a trouvé sa voie, amenant la harpe traditionnelle dans d’autres univers, plus rock, emmenant des synthés et des instruments électrifiés le long des rythmes et mélodies antiques. Et c’est justement ce travail, exécuté d’une manière particulièrement brillante et novatrice — oui on n’en est pas à notre premier disque vendu sous le nom de « tradi-moderne » — que l’on retrouve sur Kadi Yombo. Avec les percussions, qui passent de l’analogique peau tendue, aux claquements synthétiques des boites à rythmes, avec les synthés qui resonnent de concert avec les arcs à bouche, avec les voix qui reprennent la forme des chants traditionnels, avec les hommes qui questionnent et es femmes qui répondent, et avec cette harpe bavarde qui tournoie et virevolte autour des cordes grasses de la basse, et de la guitare… oui Kadi Yombo est un très bon disque !

Alors bien sûr si aujourd’hui on découvre ou redécouvre plus de trente ans plus tard cette musique avec plaisir et émotions, à l’époque… elle a eu bon nombre de détracteurs. Faut dire que beaucoup n’y ont vu qu’une manière blasphématoire de dévoyer la chose sacré pour la transformer en sujet d’amusement, et même si Papé Nziengui a connu un succès certain qui lui a permis de parcourir le monde, avec sa musique, ou en accompagnant à la harpe d’autres artistes, gabonais ou internationaux, il a toujours fait face aux critiques les plus amères, voir même à des menaces, y compris de mort.

Papé Nziengui – Kadi Yombo :

Si vous avez apprécié le contenu de cet article sur « Kadi Yombo » la nouvelle réédition de l’artiste gabonais Papé Nziengui, n’hésitez pas à visiter notre page Facebook et a y réagir, et pourquoi pas même nous encourager d’une petite mention « j’aime ».

1 Comment

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.