Ashufak Shay, on voit venir Dudu Tassa et Jonny Greenwood

D’abord il y a le toukadime, la présentation de la chanson, sur fond de crépitement, et puis place à la guitare, cette guitare, subtile, tout en finesse, qui lance d’abord un clapotis, un léger remous… et puis il y a cette voix, fébrile, qui s’allonge, s’étire, accroche une syllabe, une syllabe en arabe, et se fait rattraper par les flûtes, et le reste de l’orchestration… Voilà comment le musicien et producteur israélien Dudu Tassa et le guitariste Jonny Greenwood (si le nom vous dit quelque chose, c’est sûrement, car c’est le guitariste de Radiohead et de The Smile) viennent annoncer, comme un souffle, un nouveau projet qui verra les deux hommes collaborer à nouveau ensemble. Un projet qui, aujourd’hui prend la forme d’une chanson « Ashufak Shay », je ne te vois pas en arabe, et qui demain s’étendra sur un album complet, Jarak Qaribak, dont la sortie est attendue chez World Circuit le 9 juin prochain.

Un album qui embrasse la musique moyen-orientale comme un tout, un tout qui mélange juif et arabe, maqams et mélodies mizrahi, airs du Koweït et parfums d’Irak, souvenirs ottomans et espoirs hébreux, ou palestiniens… mais n’allez pas y voir là un quelconque mouvement politique, ce disque, Jarak Qaribak, dont le nom d’ailleurs est une expression arabe que l’on pourrait traduire par ton ami est ton voisin, c’est juste une rencontre entre deux amis, et quelques camarades musiciens, autour de vieilles chansons d’amour de la région, ces petits airs que l’on chantonne après une rencontre heureuse, ces odes que l’on susurre le soir à l’oreille de sa douce, et ceux qu’on laisse exploser dans la joie ou dans la pudeur à un mariage. Oui, rien de politique… mais les deux artistes ne sont pas dupes, quand on fait quelque chose dans cette région du monde, il y a forcément un peu de politique derrière ; mais disons alors une politique de la fraternité et de l’amour… ou, au moins, pour ne pas faire trop niais, une politique de l’art.

D’ailleurs, revenons-en à l’art, n’allez pas croire non plus quand on vous dit que les deux comparses ne font que chanter de vieilles chansons d’amour comme on les chante depuis des décennies, non, bien sûr, ils mettent leur petite touche dedans ! Pour citer Jonny Greenwood à ce sujet, ils ont, sur ce disque, essayé d’imaginer ce que Kraftwerk aurait fait s’ils avaient été au Caire dans les années 70… Donc, pour résumer, ce Jarak Qaribak, c’est des musiciens de talent conduit par Dudu Tassa et Jonny Greenwood, c’est des chansons d’amour arabes, c’est Le Caire en 1970 et le Moyen-Orient aujourd’hui, c’est Kraftwerk… tout ça en même temps ! Vivement que le disque finisse dans notre voisinage, on deviendra de bons amis !

Dudu Tassa & Jonny Greenwood – « Ashufak Shay (feat. Rashid Al Najjar) » :

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