Black(s) to the Future, l’afrofuturisme investit Paris

A une heure où la France (ou en tout cas une partie de la France), comme beaucoup d’autre pays, serait tentée par le repli sur une identité fantasmée, par l’insularité valeur pseudo-refuge (n’est ce pas messieurs les anglais), à une heure où beaucoup sont tentés par la dualité toxique du haram et du halal, du bien et du mal, du blanc et du noir, à cette heure, il y a aussi des activistes artistiques, une intelligentsia culturelle et hybride qui, elle, se bouge pour ouvrir des réflexions sur l’avenir, et la modernité ; Black(s) to the Future, le collectif fondé par Mawena Yehouessi, en fait parti.

Le cheval de bataille, ou plutôt le vaisseau, le « mothership connection » que Black(s) to the Future positionne au dessus de la ville de Paris, c’est l’afrofuturisme, cet énorme engin conceptuel et pluri-disciplinaire qui, au fil des années, a pris bien des formes. Lors de ses premières apparitions dans les années 60, au détour de la folie cosmique de Sun Ra, l’afrofuturisme se présentait comme le génial revêtement esthétique d’une quête identitaire impossible, celle des noirs-américains – si la quête des racines qui anime, plus ou moins, chaque homme, et par extension chaque peuple, à un moment de son existence était rendue impossible par les fléaux que l’on sait, l’esclavagisme, la déportation, puis la ségrégation, l’afrofuturisme était le moyen de propulser ces fameuses racines dans le futur à la recherche d’un avenir meilleur ; la construction de l’identité ne s’appuyant ainsi plus sur un terreau refuge, mais sur une quête de l’avenir et de l’espoir, toutes les assertions, tant artistiques, sociales que politiques sont permises… y compris celles un peu folles, comme celle de penser à l’origine extraterrestre des noirs, où de voir un jour un couple de noir installé à la maison blanche !

Mais depuis ses balbutiements des années 60, l’afrofuturisme a évolué…  la conquête spatiale n’est désormais plus la clé de voute de la libération du peuple noir, et, fort du soutien de plusieurs générations d’artistes et d’intellectuels, que se soit les plumes de Mark Dery ou des écrivains de SF Samuel R. Delany, Octavia Butler ou Kodwo Eshun, ou son métissage avec la pensée francophones de la négritude, l’afrofuturisme a eu le temps de s’étoffer et de gagner en maturité. En tout cas pour une partie, celle qui nous intéresse aujourd’hui, représentée par Mawena Yehouessi et ses collaborateurs, car évidemment des pans entiers du mouvement afrofuturiste ont basculé dans le consumérisme ambiant de nos sociétés, devenant ainsi que de pales enveloppes commerciales, tandis que d’autres, dévorés par la frustration, et les théories racistes dont ils ont été victimes, se rêvent à nouveau suprêmes pharaons, dominant et excluant ainsi ceux qui les ont exclus.

Mais avec Black(s) to the Future l’afrofuturisme français se présente plus que jamais comme une manière de repenser l’africanité au 21ème siècle, de peut-être rappeler la place de l’homme africain dans l’histoire, et surtout dans le future, à certain hommes politiques, de s’éloigner un peu du creuset américain pour se reconnecter avec l’Afrique et toute la diversité de ses diasporas, et d’être le plus inclusif possible. Et pour servir cette philosophie, le vaisseau afrofuturiste français à son fer de lance, sous la forme d’un festival plus qu’aguicheur qui se déroulera pas plus tard que ce week-end, à Paris.

Vous pouvez découvrir le programme complet du festival sur le site de Black(s) to the Future (n’hésitez pas d’ailleurs à vous aventurer sur les nombreux articles présents sur ce mook, mélange de mag et de book), mais l’on peut vous dire ici que le samedi soir sera marqué par la présence, inédite en France du mystique MC sénégalais Ibaaku, et du duo afropunk mad-maxien Gato Preto ; les deux soirées seront aussi rythmées par les mix habiles du sud-africain Mo Laudi et des Afronauts d’Oberkampf dont on découvre, ci dessous, un aperçu signé par Toni Polo (a.k.a DJ Cucurucho).

 

Teaser « Black(s) to the Future Festival / Un aperçu de l’Afrique de demain » :

 

Toni Polo « Black(s) to the Future Festival mixtape » :

Tracklist :
Daniel Haaksman & Spoek Mathambo – Akabongi (Mo Laudi rmx)
Calypso Rose – Calypso Queen (Mo Laudi rmx)
Mo Laudi & Sun Jun – Mandela
Mo Laudi – Afrodisiac
Ibaaku – Mustik
Ibaaku – Trouble Waterz
Ibaaku – Djula Dance
Ibaaku – Yang Fogoye
Ibaaku – Monkey Boy
Gato Preto – Dinheiro Negro
Gato Preto ft. Mc Zulu – Musica Di Gato Preto
Gato Preto – Tschukudu
Gato Preto ft. Edu K – Barulho
Ian Solow – Machine Gun Zouk (Photo Romance rmx)
Gappy Ranks – Cup Full (Photo Romance rmx)
Myriiam – Cega, Surda & Muda (Photo Romance rmx)
Photo Romance – Dançar Stupid
Photo Romance – Tarraxo Club
Lulendo – Maseke

 

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1 Comment

[…] L’an dernier, le vaisseau afrofuturiste de Black(s) to the Future arrivait au-dessus de Paris chargé de musiques, d’art, et de réflexions en tout genre ; il a depuis atterri et pris gout au cosmopolitisme parisien. Les 16 et 17 septembre, le festival investit une fois encore la coque du Petit Bain (charmant espace de culture flottant) pour une seconde édition au caractère déjà bien trempé… et pas que dans les eaux de la Seine. Si la première édition avait taché de souligner les liens culturels et intellectuels, entre Afrique et Europe, cette seconde mouture, elle, a pour but de faire naitre l’esprit de communauté, et ceux malgré le chaos de l’urbanisme et l’omniprésence des normes. […]

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