La réédition bouleversante du disque rwandais Inzovu Y’Imirindi

Il y a des disques qui s’écoutent, et puis il y a ceux qui vous possèdent. Inzovu Y’Imirindi fait partie de la deuxième catégorie. Dès les premières secondes, c’est la basse qui vous happe : profonde, ronde, presque insolente. Elle avance comme un pachyderme sûr de sa force, infatigable, imposant son pas lourd dans une danse gracieuse et virevoltante. Autour d’elle, les guitares électriques s’entrelacent, claquent, bondissent, se répondent, comme si James Brown, où le Super Biton de Ségou avait pris un aller simple pour Kigali. Les refrains lancinants vous tirent vers la transe, vous enivrent comme une longue nuit de fête qui refuse de finir. Et la batterie ? Sèche, précise, tranchante comme une lame, elle tape sans faiblir, elle découpe le temps en morceaux nets. On a beau le réécouter, ce disque, on finit toujours par revenir à la même conclusion : la basse est absolument incroyable.

Mais derrière cette ivresse musicale, il y a une histoire. Une histoire d’amour, de musique et de tragédie. Fin des années 80, Bizimungu Dieudonne et sa femme Agnes Umbibizi, entourés de quelques amis, bricolent un studio, branchent leurs guitares, et sortent une cassette qui ne ressemble à rien de ce qui s’enregistrait alors en Afrique de l’Est. Des louanges à la beauté des collines rwandaises, des chants dédiés aux dieux anciens, mais aussi des appels à l’unité, discrets, glissés entre deux grooves électriques. Comme si déjà, dans l’air saturé des années 80, flottait la rumeur sourde de la catastrophe à venir.

Et la catastrophe a frappé. En 1994, Bizimungu, Agnes, et deux de leurs compagnons de jeu, Bigirimana Augustin et Niyongamije Emmanuel, tombent sous les coups des milices. Leur musique se tait. Elle disparaît presque, effacée par le bruit des machettes et des pleurs.

Presque. Car voilà que Noella, la fille du couple, reprend le flambeau. Petite survivante de huit ans au moment du génocide, elle retrouve, des décennies plus tard, un CD miraculeusement sauvé, contenant les enregistrements originaux. Grâce à elle, à quelques acharnés, comme Matthew Lavoie et les équipes de Mississippi Records, et à un travail de restauration impeccable, Inzovu Y’Imirindi renaît aujourd’hui. Et quand ces basses incroyables se remettent à vibrer, ce n’est pas seulement de la musique qu’on entend : c’est une mémoire qu’on exhume, une vie qu’on redonne, une fête qu’on refuse de laisser mourir.

Bizimungu Dieudonne & Agnes Umbibizi Inzovu Y’Imirindi :

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