La Classique, le souffle et les grooves du continent

De la pop festive d’Yvonne Chaka Chaka à Soweto jusqu’aux grooves introspectifs du Zimbabwe d’Oliver Mtukudzi, cette playlist tisse des ponts entre les époques, les villes, les mémoires. On y entend les rires, les soupirs, les danses, les chagrins. Mariama Bâ y murmure l’amour en wolof, Cardinal Rex Jim Lawson fait tanguer les cœurs au rythme du Delta, et Orchestra Super Mazembe transforme la ville en rumba. Une sélection comme un voyage : douce, profonde, brûlante et infiniment vivante.

Et retrouvez les anciens épisodes de La Classique ici !

Yvonne Chaka Chaka « Umqombothi », claquement pop en Afrique du Sud // Afrique du Sud

Avant Brenda, avant Mshoza, avant même que la Kwaito ne descende dans les townships de Soweto, il y avait Yvonne Chaka Chaka. Reine flamboyante de la pop sud-africaine des années 80, elle offrait déjà au continent un son hybride, effervescent et profondément ancré dans la terre. « Umqombothi », c’est l’hymne de cette époque dorée, c’est un chant de fête, c’est cette bière artisanale des mères et des cérémonies, c’est le symbole de la communauté et de la résistance joyeuse.

Derrière ses synthés bondissants, ses cuivres solaires et ses chœurs féminins galvanisants, « Umqombothi » exhale une énergie brute, ancrée dans les pulsations du quotidien sud-africain. On y entend les rires, la poussière, les danses… et la voix d’Yvonne, claire et vibrante, qui résonne comme un cri d’émancipation dans un pays encore ligoté par l’apartheid.

Mariama Bâ « Yai Sama Chérie », un murmure d’amour porté par les vents chauds du Sahel // Sénégal

Avec « Yai Sama Chérie », la chanteuse sénégalaise Mariama Bâ délivre une ballade aussi tendre que saisissante, un murmure d’amour porté par les vents chauds du Sahel, et les tambours sénégalais. Dans ce titre aux allures de confidence, la voix douce et franche de Mariama glisse avec une grâce désarmante sur une instrumentation minimaliste, mêlant guitare acoustique, chœurs wolofs, et accents mandingues.

Mais derrière la délicatesse du morceau se cache une force tranquille : celle d’une femme qui parle d’amour sans fioriture, avec la poésie du quotidien et la sincérité d’un chant transmis de mère en fille. « Yai Sama Chérie » (« Maman, ma chérie ») résonne comme une berceuse dédiée à toutes les figures féminines qui veillent, aiment, et enseignent. Une chanson pleine de respect, de gratitude, mais aussi de sensualité contenue, comme un baiser posé sur le front. Un chant d’amour pur, suspendu dans le silence du soir.

Cardinal Rex Jim Lawson « Sawale », un chef-d’œuvre de highlife // Nigeria

Avant que l’afrobeat ne rugisse depuis les rues de Lagos, avant que le highlife ne devienne un emblème continental, il y avait cette voix chaude, grave, presque prophétique : celle de Cardinal Rex Jim Lawson. Et dans « Sawale », tout l’art du crooner nigérian se déploie avec majesté, entre nostalgie, ferveur et élégance. Enveloppée dans des cuivres langoureux et des guitares en apesanteur, « Sawale » est une prière amoureuse, un chant doux-amer porté par les marées du Delta du Niger. Ici, chaque note semble suspendue dans le temps, chaque silence résonne comme un soupir. La voix de Lawson, pleine de retenue et de tendresse, glisse comme une pirogue sur les eaux tranquilles d’une nuit sans lune.

Avec « Sawale », Cardinal Rex Jim Lawson livre un chef-d’œuvre de highlife introspectif, un classique intemporel qui continue de faire danser les corps tout en touchant les âmes. Un slow brûlant venu des années 60, toujours capable de faire chavirer les cœurs.

Orchestra Super Mazembe « Jiji », la lumière, la chaleur, le mouvement, la rumba // RDC, Kenya

Avec « Jiji », l’Orchestra Super Mazembe signe une fresque rythmique à la croisée des vents d’Afrique centrale et des parfums de la rumba swahili. Nés entre les rues de Nairobi et les souvenirs de leur Congo natal, les musiciens de ce groupe mythique des années 70-80 tissent ici un groove qui serpente, qui caresse et qui emporte.

Dès les premières mesures, les guitares s’enlacent comme des lianes – fines, véloces, hypnotiques. La voix, elle, chante le chagrin sans pathos, avec cette dignité propre aux grandes plaintes populaires. « Jiji », c’est la ville, c’est la foule, c’est l’abandon au cœur du vacarme. Et pourtant, dans cette mélancolie urbaine, l’Orchestra Super Mazembe insuffle de la lumière, de la chaleur, du mouvement. Le morceau prend son temps. Il s’étire, il respire, il ondule. Les percussions légères et les lignes de basse bienveillantes donnent au tout un équilibre quasi organique, comme si la musique suivait les battements d’un corps en marche, en deuil ou en désir.

Oliver Mtukudzi « Wasakara », l’humilité shona // Zimbabwe

Avec « Wasakara », Oliver Mtukudzi ne chante pas seulement : il avertit, il console, il exhorte. Le maestro zimbabwéen, à la voix rauque et pleine de sagesse, délivre ici un morceau qui résonne comme un miroir tendu à ceux qui refusent de voir le temps passer. « Wasakara » (Tu es usé, en shona) n’est pas une moquerie, c’est un rappel à l’humilité, à l’éphémère, à la dignité dans le déclin.

Porté par le groove feutré de la tuku music, ce style qu’il a façonné lui-même entre rythmes traditionnels, soul et afro-jazz, le morceau avance à pas mesurés. Guitares limpides, percussions terreuses, chœurs féminins comme des souffles d’espoir… tout ici respire la retenue et la profondeur. Mtukudzi n’élève jamais la voix, mais chaque mot pèse comme un proverbe.

Djolo – La Classique :

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