Et pendant ce temps dans le reste du monde #276

Tandis que nous traitons sur djolo.net des actualités culturelles africaines et caribéennes, les actualités musicales sont nombreuses dans le reste du monde, et dans cette rubrique simplement intitulée « Et pendant ce temps dans le reste du monde » nous vous proposons un bref tour de ce qui nous a plu cette semaine !

WaterPenny Buttons for People // USA

Ce disque est une furieuse détonation qui emporte tout sur son passage. Du bourdonnement irrésistible aux explosions de guitares, Buttons for People ne cherche pas à plaire : il prend, il griffe, il brûle. Water Penny signe ici un vrai album de rock, un de ceux qu’on garde jalousement, qu’on fait tourner jusqu’à la corde, ou qu’on télécharge – légalement, bien sûr – parce qu’il faut bien nourrir les musiciens qui rallument les flammes du genre. Entre les vapeurs blues et la sueur des amplis, Lane, Wes, Cihan et Sean tissent un pont entre l’Amérique roots et la rage moderne. On pense à Led Zep et à Idles, à ZZ Top et à Greta Van Fleet, aux explosions joyeuses des Who, et à la rage froide de Joy Division, mais surtout à ce rock sale et sincère qu’on croyait enterré sous les algorithmes. C’est rugueux, nerveux, parfois presque mystique, avec des éclats de philosophie et de poussière dans chaque riff. Buttons for People n’a rien d’un exercice de style, c’est un uppercut mélodique, un disque de conviction. Bref, un album pour les vrais, ceux qui savent que le rock, quand il est bien fait, ne s’écoute pas, il s’encaisse.

Mary Middlefield The Feast // Suisse

Mary Middlefield revient avec The Feast, un disque qui ne se contente pas de gratter la plaie du manque : il y plonge les deux mains, sans anesthésie. Entre les cordes tendues comme des nerfs et les silences qui saignent, la Suissesse livre un EP d’une intensité rare, où l’amour n’a plus rien de doux ni de romantique… n’en reste que cette faim maladive d’être choisi, regardé, reconnu. Derrière la production léchée de Gwen Buord et les orchestrations qui montent comme un orage retenu, Mary fait de sa fragilité une arme blanche. On pense parfois à un vieux film de James Bond en slow motion, parfois à une confession murmurée dans une église vide. C’est beau, c’est fiévreux, c’est dangereux. Et si The Feast sonne comme une messe, c’est parce qu’on y entre tête baissée, prêt à se consumer pour un amour qui ne rend rien, sinon la brûlure.

White Noise Cinema “Tell Me I’m Wrong” // UK

Avec “Tell Me I’m Wrong”, White Noise Cinema revient après cinq ans de silence pour foutre un grand coup de pied dans la fourmilière. Une claque sonore, dense et cinématographique, où chaque riff gronde comme un moteur prêt à exploser, chaque ligne vocale suinte la colère lucide de ceux qui refusent de se laisser digérer par les algorithmes. Le morceau avance comme une révolte mise en scène, des guitares qui s’entrechoquent, des synthés qui s’étirent en mirages électroniques, et cette voix qui tranche dans le vif : “It’s not your fault, it’s not too late.” Une phrase simple, mais qui sonne comme une dernière bouée dans un océan de contenu généré à la chaîne. White Noise Cinema rappelle ici que la machine peut copier les sons, mais jamais l’urgence, ni l’intention. Entre chaos et clarté, entre cri du cœur et uppercut digital, “Tell Me I’m Wrong” est plus qu’un retour, c’est une déclaration de guerre à la fadeur programmée.

Funhouse Mirrors « The Shoes With Red Stripes » // USA

Chez Funhouse Mirrors, même une paire de pompes devient manifeste artistique. “Shoes with Red Stripes” part d’un détail, des bandes rouges sur du cuir, pour bâtir un monde entier, un carnaval sonore où le calypso flirte avec le jazz fusion et où l’indie pop se la joue tropicale. Les cuivres claquent, les percussions s’amusent, et chaque instrument semble pris d’une crise d’égo funky. C’est brillant sans être lisse, foutraque mais élégant, un peu comme si Ezra Koenig avait perdu ses mocassins à Trinidad. Derrière les couleurs et la cadence, Funhouse Mirrors célèbre l’audace d’exister à sa manière… celle qui fait tourner les têtes, claquer les doigts et sourire les esprits libres !

Brock Taylor « You’re Still With Him » // USA

Avec “You’re Still With Him”, Brock Taylor balance une de ces ballades country comme on les aime : un peu sucrée, un peu amère, juste ce qu’il faut pour gratter là où ça fait du bien, et là où ça pique. Pas de clinquant à la Nashville ni de pop formatée, ici, c’est la vraie came, des mélodies qui collent au cœur, un peu de steel guitar qui pleure au fond, et surtout une voix, celle de Taylor, râpeuse et sincère, qui porte la chanson comme une confession au bord d’un comptoir. Derrière l’air tranquille, ça sent la solitude, la nostalgie, et cette élégance des perdants magnifiques. Bref, la country dans sa version la plus honnête : un peu mielleuse, certes, mais jamais creuse.

Al Fayhi « Methag » // Arabie Saoudite

Avec « Methag », l’artiste saoudien Al Fayhi fait chavirer la pop dans une brume de mystère et d’ivresse. Une pop feutrée, mais entêtante, où les ouds se faufilent entre des percussions en apesanteur et une production post-rock qui gronde à l’arrière-plan, comme une tempête qui refuse d’éclater. C’est un morceau qui n’a pas besoin de grandiloquence : il avance à pas lents, presque cérémoniels, pour sonder les pactes invisibles qu’on passe avec soi-même, ces promesses qu’on trahit à moitié, ces renaissances qu’on n’assume pas tout à fait. « Methag », c’est la bande-son d’un cœur qui hésite entre souvenir et devenir, entre la caresse et la fracture. Al Fayhi ne chante pas une chanson : il invoque un lieu, un état, une mue.

The Second Hand Orchestra « The Conservative’s Fault » // Suède

« The Conservative’s Fault » du Second Hand Orchestra, c’est un peu comme une fête improvisée dans un squat d’intellos suédois : tout part de travers, mais tout sonne juste. Trombone qui fuse grassement, groove bancal et afro, ironie assumée, le titre claque comme une blague amère sur les ruines d’un monde trop bien rangé. En deux jours chrono, treize musiciens ont balancé leurs idées comme on jette des pavés dans la mare, chacun avec une heure pour convaincre, enregistrer, et laisser la place au suivant. Résultat : un chaos organisé, un puzzle démocratique où chaque morceau respire la spontanéité, la maladresse géniale et la liberté pure ! Tiens, d’ailleurs, c’est Puzzle le nom de l’album dont est tiré ce « The Conservative’s Fault ».

Matt Wilde Find a Way // UK

Avec Find a Way, Matt Wilde prouve que le jazz n’a jamais été une affaire de conservatoire, mais de flair, de bricolage et de musique. Pianiste mancunien, beatmaker dans une autre vie, il pousse son art entre les volutes des clubs et la poussière des studios DIY du Nord anglais. Ce disque, sorti sur son propre label Hello World Records, n’a rien d’un exercice académique, c’est une cartographie intime où l’impro jazz se frotte aux textures électroniques, aux syncopes hip-hop, et à ce petit désordre sonore qui fait tout le charme des esprits libres. Sur Find a Way, Wilde cherche moins la perfection que la pulsation juste, celle qui tient bon quand tout tangue. Les touches de piano se font confidentes, les beats claquent avec subtilité, et le souffle des cuivres vient rappeler que même dans la brume industrielle de Manchester, il reste des braises. Bref, un disque qui groove avec la tête et le cœur, qui respire la débrouille et la classe, un jazz du de la rue, libre et lumineux.

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