Alors que toutes les pétasses du rapgame américain s’alignent à la queue leu leu derrière la trend stripteaseuse — à qui le string le plus court, à qui le booty le plus rebondi, à qui la couverture la plus crasseuse dans la presse people — le rap, le vrai, s’est retrouvé relégué au fond du vestiaire. La voix devient accessoire, le flow décoratif, la plume optionnelle. Et puis, sans prévenir, Salimata déboule avec The Happening. Pas un album, non. Un rappel à l’ordre. Un événement. Un happening, justement.
Rappeuse américaine d’origine ivoirienne, élevée à Brooklyn mais l’esprit large comme un carnet de poèmes, Salimata remet les fondamentaux au centre de la table, le rythme, la voix, la langue, la musicalité. Ici, pas besoin de surjouer l’hypersexualisation pour exister. Le pouvoir est dans la diction, la précision du verbe, l’élégance du placement. Du rap ciselé, un flow acéré comme une lame bien affûtée, porté par des instrumentales qui flirtent avec la soul, le jazz et ces beats un peu crades, un peu chauds, que le collectif 10k Global manie avec une décontraction insolente.
The Happening, conçu en grande partie à Marseille, respire l’émancipation artistique. Loin de Brooklyn mais jamais déconnectée de son ADN new-yorkais, Salimata avance en pleine maîtrise. Des morceaux comme “Foil” ou “Fergie” installent cette tension feutrée, ce swagger lent qui rappelle que parler doucement peut parfois faire plus de dégâts que crier. Ailleurs, elle s’autorise des détours house et électro, sans jamais perdre le fil. Tout est question de contrôle.
Et puis il y a l’attitude. Une bad bitch, oui, mais version haut de gamme. Pas la caricature TikTok, plutôt l’ombre portée des grandes heures de Nicki Minaj, quand l’ego rimait encore avec talent et imagination. Salimata parle cash, assume le trash talk, mais ne sacrifie jamais la poésie. Pitchfork l’avait bien compris dès “Mock Me” : parfois, entendre quelqu’un parler sa merde avec style relève presque de l’art.
Univers builder jusqu’au bout des ongles — mode, peinture, héritage ivoirien cousu main par sa mère — Salimata signe avec The Happening un disque sûr de lui, dense sans être prétentieux, audacieux sans chercher la pose. Un album qui ne court pas après la hype, mais qui la regarde passer, un sourcil levé, un sourire en coin. Le rap américain n’était pas mort. Il avait juste besoin qu’on lui rende sa voix.
Salimata The Happening :
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