La Canadienne d’origine jamaïcaine Keleta-Mae n’est pas juste une artiste. C’est une universitaire, une dramaturge, une activiste, et, soyons honnêtes, probablement quelqu’un qui ne laisse jamais un débat se finir en eau tiède. Depuis 35 ans, elle remue la musique, le théâtre et les idées comme d’autres secouent un shaker : avec conviction et sans filtre. Son projet Black And Free demandait déjà à quoi peut bien ressembler la liberté quand on la pense depuis les marges. Avec Grateful, elle tente une réponse — en musique, en chair, et en voix.
Il y a là-dedans de la soul, du reggae, du spoken word, un peu de dancehall bien piquant, et surtout un refus net du « long talking ». Comprenez : les beaux discours creux qui font semblant de mordre mais n’ont plus de dents. Dans “Move”, le message est clair : « Mi nuh inna di long talking » — garde tes promesses pour ton miroir, et fais quelque chose de concret.
Mais Keleta-Mae ne fait pas que dans la revendication, que dans le poing levé. Par exemple, le morceau qui donne son à l’album, “Grateful”, respire la gratitude comme un muscle qu’on travaille chaque jour, même au milieu des tempêtes. “ABCD” répète comme un mantra qu’il faut avancer quoi qu’il en coute, et que lorsqu’on trébuche, on recommence… et que lorsqu’on casse, on paye… ah, non ça c’est autre chose ! Et le reste de l’album déroule ainsi un fil tendu entre colère et tendresse, entre constat lucide et vision pour demain.
Résultat : un disque qui ne se contente pas de vous plaire. Il vous regarde droit dans les yeux et vous demande : Et toi, tu fais quoi, maintenant ?
Naila Keleta-Mae Grateful :
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