Tandis que nous traitons sur djolo.net des actualités culturelles africaines et caribéennes, les actualités musicales sont nombreuses dans le reste du monde, et dans cette rubrique simplement intitulée « Et pendant ce temps dans le reste du monde » nous vous proposons un bref tour de ce qui nous a plu cette semaine !
Anthony Ruptak « Phantasmagoria » // USA
Dans « Phantasmagoria », Anthony Ruptak avance comme un funambule sur une corde tendue entre désillusion et tendresse, posant sa voix sur un monde qui brûle avec le calme nerveux de quelqu’un qui a trop regardé les braises de près. Même si le décor de ce morceau s’inscrit sûrement plus dans les grands espaces américains, ceux où résonnent encore les échos poussiéreux de la country et de Springsteen, on entend surtout une légère fissure dans sa voix ; cette fêlure qui le reconnecte à des âmes tourmentées comme Asaf Avidan, voire même Janis Joplin. Ruptak pose ici une ballade apocalyptique, un poème lucide sur l’épuisement d’une époque qui confond fin du monde et fil d’actualité. Folk orchestral, indie anxieux, souffle épique et résignation têtue, « Phantasmagoria » est ce moment où l’on regarde le chaos droit dans les yeux… et où, malgré tout, on continue de chanter, juste pour vérifier qu’on est encore vivant.
Electric High « Feed Me a Groove » // Norvège
Une guitare rampante, un groove qui louvoie sournoisement, et une explosion rock : il n’en faut pas vraiment plus pour Electric High et leur dernier uppercut sonore, « Feed Me a Groove ». Les Norvégiens balancent ici un riff qui avance en crabe, gras juste ce qu’il faut, avant de tout faire voler en éclats dans un hard rock aussi nerveux qu’assumé. Ça suinte le funk toxique, ça claque avec ce petit air bravache de groupe qui sait exactement où piquer pour réveiller les corps endormis. Deux voix qui se renvoient la balle avec une nonchalance brûlante, une rythmique qui n’écrase pas totalement le champignon, mais qui refuse littéralement de lever le pied, et cette énergie un peu sale, un peu arrogante, qui fait tout le charme du morceau.
Matt Storm « Where Does This Love Go? » // Canada
Avec « Where Does This Love Go? », Matt Storm ne cherche pas à vous embarquer dans de grandes envolées, non, il préfère vous allonger sur le canapé, tirer une couverture imaginaire jusqu’au menton, et laisser le monde se débrouiller sans vous pendant trois minutes trente. Sur un beat qui va taquiner le hip-hop des 90’s, le genre de groove qui fait hocher la tête même aux sceptiques, il pose des harmonies vocales en clair obscur, comme un ciel d’hiver, et glisse cette question simple, brutale, universelle : où va l’amour qu’on fabrique ici, quand tout fout le camp ? Et pendant que Storm susurre ses doutes, Quincy Mayes joue au funambule sur le piano, avec une curiosité presque enfantine, un jazz qui cligne de l’œil sans jamais déranger la sérénité du morceau. C’est doux, c’est profond, c’est un câlin.
DRTW No Sender // Pays-Bas
Avec No Sender, le duo hollandais DRTW renverse les rôles, les pianos s’y prennent pour des beats, les batteries jacassent comme des mélodies, et très vite on ne sait plus qui mène la danse, mais on sait qu’on aime ça. Il y a du jazz dans ces volutes, certes, mais aussi du hip-hop dans les épaules, du big beat dans les éclats, cette manière frontale de faire claquer les idées sans jamais perdre la subtilité du geste. Né d’une jam à Amsterdam, l’EP avance comme une machine vivante, pleine de vapeur et d’improvisation maîtrisée, un endroit où les grooves hochent la tête, où les textures s’épaississent, et où l’on comprend, en souriant, que oui, les “big beats are the best”.
Jens Thomas & Jürgen Spiegel « New in Town » // Allemagne
Avec ce chorus ouvert tout en puissance, les musiciens allemands Jens Thomas et Jürgen Spiegel, l’un au piano, l’autre à la batterie, nous offrent un « New in Town » qui a du coffre, qui a du souffle… et qui, même sans voix, réussit à donner de la voix. Le morceau distille avec une élégance presque insolente des moments de délicatesse suspendue, aussitôt contrebalancés par des élans empreints d’un lyrisme large, assumé, qui ne manque ni de charme ni de caractère. On y sent deux musiciens qui ne cherchent pas l’effet pour l’effet, mais qui sculptent l’espace, qui jouent avec l’air, avec les silences, avec la vibration même de la pièce, et qui parviennent, en quelques minutes, à donner l’impression d’une arrivée en ville à la fois intime et grandiose.
Trio Ramberget « TR / IV » // Suède
Quand il s’agit de faire de l’ambient, on croise différents types de musiciens. Ceux qui passent des nuits à empiler des couches d’effets, à superposer les machines, ceux qui posent un enregistreur dans une forêt humide et publient la pluie comme si c’était leur œuvre, et puis… il y a les Suédois du Trio Ramberget. Eux ne se contentent pas de s’exiler sur une petite île nordique, ils s’y enferment dans une vieille citerne à huile désaffectée, histoire de jouer avec une reverb naturelle qui ferait rougir n’importe quel plug-in. De cette cavité métallique surgit « TR / IV », premier, et seul, extrait de leur prochain album attendu au tout début de l’année prochaine. Un morceau bourdonnant, ténu, presque vivant, où le métal, le bois, l’air et le temps discutent dans un chuchotement infini. Ici, l’architecture devient instrument, l’espace devient partenaire, et le trio poursuit son exploration de résonance comme d’autres poursuivent une illumination mystique, sans bruit, sans emphase, mais avec un aplomb désarmant.
Martin Martyn « Carre » // Japon
Avec « Carre », le duo japonais Martin Martyn revient jouer dans la cour des grands minimalistes, ceux qui savent étirer une ambiance comme on étire une ombre, jusqu’à ce qu’elle devienne un couloir élégant, presque infini. Ici, pas de fioritures, pas de poudre aux yeux : juste des synthés qui respirent lentement, un piano qui entrouvre la porte, et cette sensation de glisser dans un espace propre, clair, presque clinique, mais d’une beauté désarmante. « Carre » avance à pas mesurés, se déplie comme un origami sonore, et rappelle que la simplicité, lorsqu’elle est tenue avec ce calme et cette précision-là, peut être plus vertigineuse qu’une cathédrale de bruit.
David Laborier « I Don’t Think So » // Luxembourg
Dans « I Don’t Think So », David Laborier dégaine sa guitare comme d’autres dégainent une punchline, sèche, incisive, sans demander la permission. Ici, pas de voix, pas de fioritures, juste une stratification de guitares qui s’empilent, en tension et prête à exploser. Laborier nous sert une instrumentale qui sent la sueur des studios ciné des années 90, la nervosité des nuits blanches et l’élégance d’un vieux film d’action où personne ne sourit mais où tout le monde conduit vite.
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