Et pendant ce temps dans le reste du monde #277

Tandis que nous traitons sur djolo.net des actualités culturelles africaines et caribéennes, les actualités musicales sont nombreuses dans le reste du monde, et dans cette rubrique simplement intitulée « Et pendant ce temps dans le reste du monde » nous vous proposons un bref tour de ce qui nous a plu cette semaine !

Withoutend « Paper Cranes » // USA

Chez Withoutend, les maths ont des sueurs froides. Leur nouveau morceau, “Paper Cranes”, c’est une équation qu’on résout à la sueur du front, une montée d’adrénaline savamment calculée. La folle cavalcade de la batterie occupe tout l’espace, tente de couvrir le bourdon des guitares qui s’entremêlent, et puis il y a la basse, claire, claquante, qui fend ce chaos comme un rond chauffard dans la brume. Derrière ce tumulte orchestré, une précision chirurgicale, les signatures rythmiques se succèdent avec une élégance déroutante, les textures s’empilent, se désagrègent, renaissent. On pense à House of Waters, à Tigran Hamasyan, à ces architectes du rythme qui savent rendre la complexité euphorique. Paper Cranes n’est pas un simple morceau de math rock : c’est un champ de bataille entre virtuosité et vertige, une partition où chaque battement semble calculé, puis arraché à la raison.

Mischa Blanos « Basilica » // Roumanie

Quand on entre dans une basilique, on s’attend à tout sauf à ça ! Avec “Basilica”, le pianiste roumain Mischa Blanos souffle les cierges et les silences suspendus et fait trembler les vitraux. Ici, pas de recueillement ni de notes pieuses, c’est un office de jazz électrifié où le piano cogne comme une machine, où les percussions s’emballent, et où les synthés font danser les anges sur un BPM de rave. Blanos, fidèle à sa réputation de sorcier sonore, mêle la noblesse du piano acoustique à l’énergie brute de l’électronique, pour un résultat qui fraye franchement avec la techno du début du siècle. C’est violent, physique, presque profane, et pourtant, terriblement spirituel.

T.I.M ft. Adrian Young “What Is Wrong & What Is Right” // Pays-Bas

Avec ce nouveau titre, T.I.M. nous donne envie de ressortir les bandanas et les pantalons en cuir du tiroir. “What Is Wrong & What Is Right” sent bon les années 90. Dans une ambiance qui taquine aussi bien les Red Hot que les Beastie Boys, aussi bien les Guns que Cypress Hill, T.I.M. soulève les guitares et balance un shot d’énergie rock’n’roll bien senti. Aux fûts, Adrian Young, le batteur de No Doubt, qui envoie un groove sec et nerveux, pendant que John Hayes (Mother’s Finest) co-produit le tout avec une touche funky. Une claque sonique, un rock alternatif musclé, old-school dans l’âme mais dopé à l’énergie d’aujourd’hui.

Peter Hägerstrand « Aurora » // Finlande

On pourrait presque s’y tromper. « Aurora », le nouveau titre de Peter Hägerstrand, a d’abord des airs de vieux tube de rock italien, mélodie ample, envolées romantiques, refrains qui s’attrapent comme on hume une odeur agréable dans le vent. Et pourtant… il y a ces drôles de sons, ces theremins tordus, ces éclats électroniques venus du Nord, qui trahissent l’origine bien plus froide de cette aurore-là. Car Hägerstrand, l’élégant sorcier d’Helsinki, ne fait pas dans la dolce vita, il préfère les claviers givrés aux guitares solaires, les silences nordiques aux ruelles de Naples. « Aurora « s’écoute donc comme un tube italien, à pleins poumons, sauf qu’au lieu d’un spritz, c’est un lonkero qu’on sirote ; ce gin tonic finlandais qui, comme la chanson, glace le cœur avant d’enflammer la tête.

Nick Marks « do wut u luv » // USA

Quand on a lancé “do wut u luv”, le nouveau titre de Nick Marks, on s’est dit, l’espace d’un instant, pfff… encore un de ces morceaux de jazz fusion blindés de phrasés ultra-techniques, trop techniques. Et puis… là… amorti de la poitrine, passement de basses, contrôle du synthé, et bam, le groove en pleine lucarne, qui nous cueille comme un fruit bien mûr. Marks balance ici une ode à la spontanéité, taillée dans la chaleur analogique et la sueur nocturne de son studio. Rhodes sensuel, cuivres soyeux, batterie tranquille mais ferme, tout est calibré pour faire fondre la rigidité du “parfait”.

Inwards « Fishing » // UK

Chez Inwards, la gravité n’a jamais vraiment eu droit de cité. Avec “Fishing”, dernier appât avant la sortie de son album Free Flow, le Britannique Kristian Shelley jette ses filets dans une eau trouble où les basses UKG croisent des voix samplées comme des reflets fugaces. Rien à voir avec la pêche — il l’admet lui-même — mais tout à voir avec la nage, avec ce moment suspendu où le corps, l’onde et la pensée s’alignent dans un même frisson. “Fishing” flotte, remue, glisse, et finit par avaler l’auditeur dans une boucle de clarté artificielle, un sourire au coin du cerveau.

Ruud Voesten Ambrosia II // Pays-Bas

On se ressert une lichée d’Ambrosia avec ce deuxième cru signé Ruud Voesten, et il tombe à point nommé. Si le batteur et compositeur néerlandais avait jeté son premier opus dans les flammes de l’Enfer de Dante, Ambrosia II monte d’un cran, littéralement, ou plutôt littérairement. Ici, c’est le Purgatoire qui s’étire devant sa batterie, entre élévation et supplice, entre ciel et terre, entre deux eaux et deux oreilles. On y flotte dans une suspension étrange, un entre-deux où chaque coup de cymbale semble peser le poids d’une âme. En résidence à Florence, Voesten a sculpté ce disque comme une fresque méditative, à mi-chemin entre jazz, musique de chambre et prière suspendue. Le piano et la clarinette y dialoguent comme deux pénitents — sobres, fragiles, affamés — dans une quête d’absolution qui se savoure à petites gorgées. Le batteur, lui, suspend ses notes au jugement de celui dont seul le verdict compte : le public. Et franchement, on a bien envie de le sortir de son purgatoire… juste pour voir ce que donnerait son Paradis.

Pullman « Weightless » // USA

Vingt-cinq ans de silence, et voilà que Pullman ressort de sa cabane, guitares en bandoulière et plein d’émotion dans les cordes. Avec “Weightless”, le supergroupe acoustique de Chicago, né de la rencontre des groupes Tortoise et Come, reprend le fil là où il l’avait laissé, quelque part entre le folk contemplatif et le post-rock en apesanteur. Les guitares se frôlent, se répondent, tissent des cercles lents comme une conversation entre vieux amis qui se retrouvent sans trop oser hausser la voix. Rien de démonstratif ici, juste une grâce patinée, une clarté qui ne s’invente pas. « Weightless » porte bien son nom, c’est une lévitation tranquille, un retour sans nostalgie, un souffle qui rappelle qu’il n’y a pas besoin de fracas pour être bouleversant.

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