Et pendant ce temps dans le reste du monde #274

Tandis que nous traitons sur djolo.net des actualités culturelles africaines et caribéennes, les actualités musicales sont nombreuses dans le reste du monde, et dans cette rubrique simplement intitulée « Et pendant ce temps dans le reste du monde » nous vous proposons un bref tour de ce qui nous a plu cette semaine !

Bad Boombox & Mija « Obsession » // USA, Allemagne, Bulgarie

Bad Boombox et Mija viennent d’accoucher d’une “Obsession” taillée pour les dancefloors moites et les lendemains flous. C’est le genre de track qui commence en douceur, te caresse avec ses basses sensuelles, avant de t’enfermer dans sa boucle hypnotique comme une mauvaise idée qui tourne trop bien. Entre le clinquant des clubs baléariques et la sueur des warehouses berlinoises, les deux producteurs jouent les alchimistes : un peu de house old school, une pincée de techno qui pique, et ce groove qui colle à la peau. Mija y glisse toute l’insolence de sa voix, Bad Boombox fait monter la fièvre — et ensemble, ils signent une prière païenne pour les cœurs qui battent à 128 BPM. Bref, “Obsession” n’est pas qu’un morceau : c’est le moment où la nuit te regarde danser et te reconnaît enfin.

Kimchii x Saturday, Monday « I Still Got You (On My Mind) » // Suède

Quand Kimchii et Saturday, Monday se croisent, inutile de chercher la sortie : la nuit vient de commencer. Sur “I Still Got You (On My Mind)”, les deux producteurs suédois troquent la pudeur nordique pour un club berlinois imaginaire, moite, saturé, presque sentimental. Une basse filtrée ronronne comme un moteur sous tension, la voix falsetto de Kimchii flotte dans la brume des strobes, et la production de Saturday, Monday pousse tout droit vers le dancefloor — sans détour, sans chichi. C’est du UK garage repeint à la scandinave, un mélange de mélancolie et de BPM, un hymne pour ceux qui dansent en pensant encore à quelqu’un. I Still Got You (On My Mind), c’est la nostalgie qui groove, le chagrin qui se maquille en extase, et le corps qui dit à la tête : « tais-toi, on continue de danser. »

Mischa Blanos « Love In Motion » // Roumanie

Chez Mischa Blanos, l’amour ne se chuchote pas, il s’électrifie. Sur “Love in Motion”, le pianiste roumain balance son cœur dans un club stroboscopique, quelque part entre une fugue de Rachmaninov et une course-poursuite des Chemical Brothers. Les synthés pointent comme des phares dans la nuit, les percussions cognent avec la précision d’un cerveau en insomnie, et le piano, lui, tente de remettre un peu d’humanité dans cette mécanique rythmique. Fils du béton de Bucarest, gamin du communisme devenu architecte de liberté sonore, Blanos transforme chaque touche en manifeste : bouger, vibrer, désobéir. “Love in Motion”, c’est moins une chanson qu’une évasion — un cri d’amour en accéléré, lancé à pleine vitesse contre le mur de la routine.

Simon Pope « Hain » // Allemagne

Chez Simon Popp, la batterie n’est pas un instrument, c’est un langage. Un truc qui précède les mots, qui parle à la moelle avant de parler au cerveau. Sur “Hain”, extrait de son album Trio, le percussionniste munichois convoque deux autres frappeurs d’âmes, Sebastian Wolfgruber et Flurin Mück, pour un rituel à trois — un sabbat de peaux, de bois, de métaux et de résonances. Ici, pas de batterie rock ni de rythmique jazz proprette : on tape, on respire, on tisse. Les pulsations se mêlent, se cassent, se recollent, comme si chaque battement tentait de retrouver un battement plus ancien, celui du cœur collectif. “Hain”, c’est du groove sans ego, du tempo sans tempo, une transe ciselée dans le silence. Entre spiritualité et artisanat, entre Steve Reich et un feu de camp ancestral, Simon Popp ne joue pas de la musique : il la déterre.

Nucleus Trio ft. Charles Owens « Naima » // USA

Avec “Naima”, Charles Owens et le Nucleus Trio ne reprennent pas Coltrane, ils le réinvoquent — comme on rallume un encens rare dans un club enfumé. Le morceau s’ouvre sur un Fender Rhodes qui coule comme du miel tiède sur un groove nerveux, pendant que la basse et la batterie tracent la ligne de fuite, tendue, hypnotique. Et au-dessus, le sax d’Owens, chaud, presque brûlant, tente de toucher ce fantôme nommé Trane, sans jamais le copier, juste en le saluant. Ce n’est pas une reprise, c’est une conversation d’âme à âme, un souffle qui se souvient de ce que c’est que d’aimer jusqu’à la note.

Play_Ground Night Rides // Slovénie, Porto Rico, USA

Play_Ground reprend la route, phares allumés, avec Night Rides, un EP qui sent le bitume chaud et les volutes de jazz nocturne. Mené par le saxophoniste slovène Jan Kus, le groupe taille ici une virée où le swing flirte avec la syncope électronique, où les ombres de New York se mêlent aux souvenirs des Balkans. C’est encore ce jazz-là — celui qui plane et fait planer — entre deux passes rythmiques tranchantes comme des virages de périph’, entre rêverie urbaine et dérapage contrôlé. Avec Dan Martínez à la basse et une modernité qui ne s’excuse pas d’exister, Play_Ground continue de brouiller les frontières : le jazz n’est plus une case, c’est une route — longue, libre, lumineuse — où l’on roule sans GPS, juste au groove et à l’instinct.

múm History of Silence // Islande

Onze ans de silence, et múm revient. Pas avec un cri, pas avec un grand fracas, mais avec un souffle — un soupir électronique suspendu entre deux saisons, entre deux continents. Leur nouvel album, History of Silence, n’est pas une réapparition, c’est une réincarnation : deux ans de déconstruction minutieuse, d’analogique trituré et de textures numériques cousues main. Là où d’autres empilent des beats comme on empile des meubles Ikea, múm préfère le flou poétique, l’imperfection qui respire. Ici, le temps se plie, se tord, s’arrête même : les mélodies errent comme des fantômes, les voix s’effacent au bord de l’écho, et le silence devient matière première. On pense à du vent enregistré sur cassette, à un piano qui hésite avant de se souvenir qu’il sait encore jouer. L’album, fidèle à l’ADN du collectif islandais, offre une musique qui flotte entre les villes et les années, cousant ensemble distance et intimité, froid et chaleur, légèreté et mélancolie. History of Silence, c’est le retour d’un groupe qui n’a jamais vraiment disparu : il s’était juste fondu dans l’air.

Shrunken Elvis Shrunken Elvis // USA

Shrunken Elvis, c’est un peu comme si trois musiciens fatigués des refrains bien peignés de Nashville avaient décidé de se perdre dans un brouillard européen pour mieux renaître. Spencer Cullum, Sean Thompson et Rich Ruth balancent les étiquettes à la poubelle et bricolent un instrumentalisme débraillé, entre steel guitar, nappes de synthés et jazz cosmique. Leur album Shrunken Elvis sonne comme un road trip sans destination, où l’improvisation devient la carte et la boussole. Pas de solos pour flatter l’égo, pas de grand discours sur “l’authenticité” : juste trois cerveaux branchés sur la même fréquence, celle du lâcher-prise. Un disque fait sans objectif, mais avec cette grâce rare de ceux qui ne cherchent rien — et finissent par tout trouver.

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