Il y a des musiciens qui débarquent dans le game comme des météorites, on se demande d’où ils sortent, et puis il y a Aba Diop. Lui, il ne vient pas de nulle part. Il vient de Dakar, il vient d’une longue lignée de griots, et ça s’entend : chaque coup de sabar qu’il assène, c’est un pan d’histoire qui se dégage, une mémoire qui refuse de se taire. Et si aujourd’hui on le retrouve à enregistrer aux États-Unis, entouré de pointures du jazz et du blues comme John Medeski, ce n’est pas parce qu’il a plié bagage pour “s’intégrer”, mais bien parce qu’il a décidé d’imposer ses tambours là où d’habitude, c’est la guitare électrique qui mène la danse.
Avec Family, deuxième album de Aba Diop & The Yermande Family, le sabar et le mbalax s’invitent sans gêne dans le paysage sonore américain. Pas en arrière-plan, pas comme un folklore qu’on saupoudre par-dessus un groove déjà ficelé, mais comme le moteur même de la musique. C’est le sabar qui dicte, qui pulse, qui pousse le reste à suivre. Et autour d’Aba, il y a cette troupe bigarrée, cette “famille” qui relie deux continents : la kora de Noumoucounda qui trace ses arabesques intemporelles, le tama de Samba Ndokh qui ricoche comme une rafale, la basse de Thierno Sarr qui garde tout au sol, la guitare de Jason Hosier qui navigue entre rock et mbalax, et bien sûr les claviers de Medeski, capables d’envoyer la musique dans une autre galaxie. Sans oublier les voix : celle de Zeyna Ngom Diop, griotte jusqu’à la moelle, et celle du fils d’Aba, Ahmed, qui rappelle que le respect et la transmission s’enseignent dès l’enfance.
Car oui, plus qu’un disque, Family est une histoire de transmission. C’est ça, le rôle du griot : raconter, transmettre, extirper la moelle des histoires anciennes et des luttes présentes, et les transformer en sons qui guérissent. “Yermande”, en wolof, ça veut dire compassion. Et cet album, c’est exactement ça : une compassion qui résonne en tambours, en cordes, en voix. Une compassion qui se danse autant qu’elle s’écoute.
Bref, Aba Diop n’est pas un “nouvel arrivant” sur la scène mondiale. C’est un vieux maître qui vient rappeler au monde que les racines du groove, elles ont un nom : sabar. Et que ces racines, il ne les préserve pas dans le formol du folklore, mais il les propulse dans l’avenir.
Aba Diop & The Yermande Family Family :
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