Dans Where We Go, le dernier EP de la chanteuse d’origine malgache Elina Jones, il y a quelque chose de très lent, presque une stagnation, qui coule irrémédiablement le long d’un bayou que la chanteuse aurait étiré jusqu’aux portes de Lyon, où elle réside. Et puis… un courant, non, un groove, emporte le tout vers d’autres cieux, les cyprès s’ouvrent et les chauves se regarnissent, une voix monte dans un tombereau de lumière fusante, Elina et ses fireflies entrent dans la danse, le ciel vibre, oscille, tempête, et s’embrase, le bayou aussi !
Et… et, et, tout retombe… on se retrouve à nouveau englué dans cette saveur toute américaine qui colle au zinc d’un comptoir mal nettoyé, cette pesanteur moite et noire d’un pays où il y a encore pas si longtemps il ne faisait pas bon être noir. Le front rythmique, tenu par la basse de Théo Boero et la batterie de Sabri Belaïd, se met en branle dans une de ces lentes et lancinantes progressions qui tient du blues, et aussi un peu de l’Afrique… Et devant les yeux de ces infatigables canassons de la cadence, viennent danser deux lucioles, la guitare de Thibault Le Guérinel et la voix de Elina Jones, douce, ronronnante et… et explosive ! La guitare solote de plus belle, la voix s’emballe, crisse, grince, fulmine, une déflagration de rock, de funk, de soul… et… respiration… souffle… s’apaise, la basse et la batterie continuent sans rien changer à leur allure !
Si l’ambiance de ce Where We Go respire la soul américaine d’antan, celle des années 60, du black power, du soul power et du power to the people, Elina Jones ne se laisse pas pour autant piéger par les enjeux du passé. Pas de LBJ et de KKK, pas de Civil Rights Act et guerre du Vietnam, sur cet EP la chanteuse d’origine malgache explore des thématiques bien plus contemporaines, allant des relations virtuelles à l’égoïsme induit par nos sociétés de consommation, en passant par l’émancipation féminine et l’indéniable nécessité d’un virage écologique… Mais, en attendant ce dernier, nous, on se contentera de ce slalom entre soul et rock exécuté avec brio par Elina Jones et ses Fireflies sur Where We Go.
Elina Jones – Where We Go :
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