L’instant Vinyl : 90. « Gejo » des Zimbabwéens de Kasongo Band

Bienvenue dans ce nouvel épisode de notre série « L’instant vinyl », cette rubrique dédiée aux pépites du passé, où nous dépoussiérons et partageons avec vous des disques qui ont marqué l’histoire de la musique. Et pour ce quatre-vingt dixième opus, nous quittons les Caraïbes (cf. l’instant vinyle n° 89), pour nous rendre au Zimbabwe, et y découvrir le disque Gejo, du Kasongo Band.

Sorti en 1990 chez Gramma Records, le disque qui nous intéresse aujourd’hui, Gejo, marque un tournant dans l’histoire du groupe zimbabwéen Kasongo Band, il est le premier à paraitre sous la direction de Knowledge Kunenyati (il est d’ailleurs signé à l’arrière de la pochette « Knowledge Kunenyathi and Kassongo Band »). Mais pour mieux comprendre ce qui est dit là, il faut revenir un peu en arrière, aux origines du Kasongo Band.

C’est un groupe qui a été constitué, en 1977, par sept combattants de la libération du Zimbabwe en exil en Tanzanie. C’était une époque ou la guerre faisait rage entre les partisans d’un Zimbabwe libre, et le pouvoir blanc de ce qu’on appelait alors encore la Rhodésie du Sud. Emmené par Ketai Muchawaya, le groupe s’emploie, lorsqu’il ne combat pas, à jouer une musique empreinte de fierté et de l’esprit de la lutte des populations autochtones contre les colons britanniques, le Chimurenga, tout en y adjoignant certaines colorations inspirées par la musique congolaise, et plus particulièrement au kwassa kwassa ; d’ailleurs le nom de Kasongo est emprunté à un titre de l’Orchestre Super Mazembé.

Knowledge Kunenyati, dont nous parlions plus haut, lui ne fait pas partie des membres fondateurs du groupe, à vrai dire il n’est recruté qu’en temps que portier, et ce n’est que bien plus tard, en 1983, qu’on le voit débarquer sur un album studio en tant que choriste.

Les années 80, initiées par l’indépendance du Zimbabwe, furent une décennie de grand succès pour le groupe, les tournées et les concerts, tout comme les albums, s’enchainèrent. Le Kasongo Band s’impose au Zimbabwe comme une des formations majeures (c’est d’ailleurs en tout pas moins de 18 musiciens qui sont passés par ses rangs), la fête, les groupies, et bientôt l’argent devient le quotidien des musiciens. Mais c’est ce dernier vice qui vient semer le trouble au sein du groupe…

Les membres du Kasongo Band ont été tour à tour combattants, musiciens, mais certainement pas comptables ! Donc quand les royalties de leurs albums commencent à être acquittées, le groupe se divise sur le partage des cachets des musiciens, et des droits d’auteurs des compositeurs… En 1989, Ketai Muchawaya renonce à la direction de l’orchestre et part fonder un nouveau groupe, les Simba Brothers. Knowledge Kunenyati qui a, depuis ses débuts en tant que vigile, largement gagné en influence au sein du groupe en profite pour reprendre la main ! Et il fait honneur à son fauteuil en portant haut les couleurs du chimurenga et du sungura sur encore trois albums, et le changement de décennie.

Mais si le groupe peut s’enorgueillir d’avoir sur son banc quelques stars comme Rex Moto Moto et Sibanda, cela aussi causera de nouveau trouble. Sibanda a des ambitions à la taille de ses chevilles, et veut être nommé leader du Kasongo. S’en suit alors une véritable bataille de magie noire digne d’un Harry Potter, Sibanda ramène quelques potions dont son ethnie a le secret, tandis que Knowledge lui s’en remet à un n’anga, un sorcier, que connait son père. Et visiblement, la magie de Kunenyati s’avère plus puissante que celle de Sibanda, qui décide de reprendre sa place dans le rang, en tant que simple musicien. Mais une mauvaise ambiance s’installe, et Knowledge Kunenyati décide de quitter le groupe. Il part fonder les Muzokomba Movers, avec qui il enregistre quelques albums et rencontre un succès certain.

Mais, peu de temps plus tard, les membres du Kasongo viennent le trouver et l’implorent de venir reprendre la direction de leur orchestre ! Il consent ! Knowledge Kunenyati dirigera le Kasongo Band encore jusqu’en 1999, date à laquelle il rentrera dans les ordres, et se consacrera à l’église… et toujours un peu à la musique puisqu’il enregistrera en solo trois nouveaux albums de gospel.

Aujourd’hui, le Kasongo Band a disparu, et pour cause, sur les quelque 18 musiciens qui ont fréquenté ses rangs, 17 sont morts, seul reste Knowledge Kunenyati.

Kasongo Band – Gejo :

Tracklist :
1. Gejo
2. Vakuru Wirirana
3. Manyepo Kuna Sadunhu
4. Ita Basa Sebasa
5. Nzou Samanyanga
6. Isou Vanhu

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