C’était un 20 Avril, le Printemps berbère en Algérie

C’est le 20 avril 1980 que se déroule le printemps berbère en Algérie… et si le printemps est souvent synonyme de fleurs, de beaux temps qui arrive, et tout ce genre de considérations bucolique, ici il n’en est rien, il est plutôt question de lutte et d’émancipation.

Resituons le contexte, l’Algérie, grand et riche pays du nord de l’Afrique sous la coupe des Français, qui après avoir conquis le pays par une offensive des plus violente, en ont fait un département. Mais la construction d’une identité française d’Algérie souffre du racisme institutionnalisé, et de la mise à l’écart de la majorité de la population autochtone, et après une première moitié de XXe siècle émaillé de violences qui voit naitre un nationalisme algérien structuré, l’inévitable se produit et en 1962 le colon français est chassé du pays. L’Algérie indépendante est née.

Une naissance dans la douleur qui n’épargne pas les nouveaux maitres des lieux de devoir trouver un nouveau paradigme pour le pays… pour le FLN au pouvoir se sera le socialisme et l’arabisation, c’est-à-dire la construction de l’identité nationale autour de l’identité musulmane et de la langue arabe. Problème. Il se trouve qui si aujourd’hui on parle communément d’arabe pour designer les populations du Maghreb, la situation est bien plus complexe dans la réalité que sur le papier, et que beaucoup d’Algériens ne se reconnaissent pas dans cette arabisation à marche forcée ; dans certaines régions des populations ne sont même absolument pas arabophone. La minorité berbère du pays, qui représente tout même environ 17 % de la population, refuse d’abandonner son identité, et en 1980 la situation dégénère.

Tout commence à Tizi Ouzou, en plein cœur de la Kabylie. Dans l’université de cette grande ville berbère, les intellectuels kabyles prennent l’habitude de développer des activités, que ce soit des cours, des débats, des pièces de théâtre, ou encore des lectures, autour de la langue tamazight. Autant dire que les négociations avec les autorités de la Wilaya pour recevoir les autorisations pour organiser ces événements sont sensibles !

Le 10 mars 1980, les responsables de la Wilaya de Tizi Ouzou annulent une conférence de l’écrivain Mouloud Mammeri sur la poésie kabyle ancienne, avançant le prétexte d’un ordre émanant d’Alger. Des manifestations et des grèves éclatent un peu partout en Kabylie, mais aussi à Alger ; le 7 avril une importante manifestation sera réprimée avec violence dans la capitale algérienne. Le 10 avril la grève générale est sonnée dans toute la Kabylie. Le président algérien Chadli Bendjedid rajoute de l’huile sur le feu en déclarant le 17 avril que l’Algérie est un pays « arabe, musulman, algérien », et que « la démocratie ne signifie pas l’anarchie », et en lançant des assauts sur les lieux de Tizi Ouzou occupés par les grévistes. Le 20 avril c’est l’université qui à son tour est assiégée par les autorités. La région entière est à l’arrêt, des barricades sont dressées un peu partout en Kabylie, les panneaux, enseignes, et mêmes plaques de rues en arabe sont arrachés. C’est le printemps berbère !

Le gouvernement isole totalement la région, déclare l’état d’urgence, et écrase le soulèvement après quatre jours d’affrontements violents qui feront 32 morts. Après ce bilan dramatique le gouvernement est obligé de calmer le jeu, il libère les personnes arrêtées, et ouvre le dialogue sur l’avenir de la langue berbère. Des discussions dont les fruits prendront bien longtemps à arriver à maturité, car si des ateliers de Berbères voient le jour dans les lycées et les universités dès la rentrée suivante, l’histoire des berbérophones sera encore largement émaillée de violence, mais le réveil culturel a eu lieu.

 

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